Marguerite YOURCENAR (1903-1987)

TABLE DES MATIERES

PETITE BIOGRAPHIE DE M. YOURCENAR

Marguerite Yourcenar naît en 1903 à Bruxelles sous le nom de Marguerite Antoinette Jeanne Marie Ghislaine Cleenewerck de Crayencour.  fait partie de la noblesse du Nord de la France, tandis que sa mère, Fernande de Cartier de Marchienne, appartient à la noblesse belge.

Mais sa mère décède tragiquement  dix jours après sa naissance et Marguerite sera élevée par sa grand-mère paternelle et son père, un aristocrate anticonformiste qui lui laisse accéder à tous les livres de sa bibliothèque. Elle obtient brillamment son baccalauréat.

Passionnée de littérature dès son plus jeune âge, Yourcenar  écrira :   « Le véritable lieu de naissance est celui où l’on a porté pour la première fois un coup d’œil intelligent sur soi-même : mes premières patries ont été les livres ». (In Mémoires d’Hadrien)

Elle publie dès  l’âge de 19 ans, un recueil de poésies: Les dieux ne sont pas morts.

Mais c’est à 27 ans qu’elle publie son premier roman : Alexis ou le Traité du vain combat. Il s’agit d’une longue lettre dans laquelle un homme, musicien renommé, confie à son épouse son homosexualité et sa décision de la quitter. L’auteure démontre déjà une capacité remarquable à explorer les tourments intérieurs de son personnage. Alexis “s’interroge pour mieux comprendre le monde et mieux se comprendre lui-même”, dans ce qui constitue moins une lettre qu’un “dialogue avec lui-même”.

Cette première œuvre contient donc déjà en germe toutes les qualités qui feront la force des textes de Yourcenar : la profondeur psychologique, l’élégance stylistique, l’audace thématique et la capacité à transformer l’anecdote personnelle en réflexion universelle sur la condition humaine. 

 

Après le décès de son père en 1929, Marguerite Yourcenar mène dans les années 1930 une vie bohème entre Paris, Lausanne, Athènes, les îles grecques, Istanbul et Bruxelles. En 1930, André Fraigneau, alors jeune écrivain et éditeur chez Grasset, découvre l’essai de Yourcenar sur Pindare et joue un rôle décisif dans sa carrière en publiant plusieurs de ses œuvres. Elle éprouve pour Fraigneau une passion amoureuse intense, mais celui-ci préfère les hommes. Elle décrit cette impossible passion dans Feux, paru en 1936, composé de textes d’inspiration mythologique entrecoupés d’apophtegmes[1] où elle traite le thème du désespoir amoureux. Elle reprend ce thème dans Le Coup de grâce (1939), court roman sur un trio amoureux pendant la guerre d’indépendance lettonne. La nouvelle Comment Wang Fô fut sauvéfait partie des Nouvelles orientales publiées en 1938.

[1] Parole mémorable ayant une valeur de maxime.

Nouvelles orientales

Arrive la guerre et en 1939, Yourcenar part aux Etats-Unis et rejoint Grace Frick, sa traductrice américaine avec laquelle elle vivra une relation passionnée. Grace sera à la fois sa traductrice, son amante et jouera un rôle essentiel dans la production littéraire de Yourcenar. Elles vivront ensemble  jusqu’à la mort de Grace en 1979. 

Petite-Plaisance, maison de Yourcenar , Maine aux États-Unis, sur l'île des Monts Déserts à la frontière du Canada.
Marguerite Yourcenar et Grace Frick

Avec Les Mémoires d’Hadrien (1951), Yourcenar connait la célébrité. L’œuvre renouvelle le genre du roman historique en créant un modèle d’autobiographie fictive qui mêle reconstitution historique rigoureuse et exploration psychologique profonde. Ce roman historique est présenté comme “une longue lettre d’un vieil empereur adressée à son petit-fils adoptif et éventuel successeur âgé de 17 ans, Marc Aurèle”. Il s’agit d’une autobiographie fictive de l’empereur Hadrien (empereur romain qui règna de 117 à 138).

Hadrien confie le but de son projet : “me définir, me juger (…), me mieux connaître avant de mourir”. Cette introspection révèle que “le moi est inconstant, instable et fuyant”. L’œuvre constitue donc  une méditation de l’empereur à la fin de sa vie, centrée sur les valeurs d’“humanisme, pacifisme, tolérance”. Hadrien prône “les idéaux de justice, de tolérance et de modération”, s’opposant au règne guerrier de Trajan.

L’histoire d’amour passionnée d’Hadrien avec Antinoüs, jeune Bithynien, constitue l’apogée du récit. Sa mort tragique en Égypte marquera un tournant dans la vie d’Hadrien.

« Ce jeu mystérieux qui va de l’amour d’un corps à l’amour d’une personne m’a semblé assez beau pour lui consacrer une part de ma vie »

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En 1968, elle achève L’Œuvre au noir, roman se déroulant pendant le XVIe siècle européen, qui explore la quête de liberté intellectuelle, la recherche de soi et la lutte contre l’obscurantisme. À travers Zénon, personnage humaniste, Yourcenar offre une réflexion sur la condition humaine dans un monde “misérable, mesquin, injuste, cruel, bornéen proie à un “profond désarroi qui se mue en rage destructrice”. Le personnage incarne la victoire de l’esprit par le refus du cloisonnement : “Qui serait assez insensé pour mourir sans avoir fait au moins le tour de sa prison ?”. Mais la méditation de Zénon se déplace aussi « de l’homme vers la nature, dont la cruauté s’accompagne d’une innocence qui fait défaut à ce dernier ».  

L’humanisme de Yourcenar  respecte « la différence entre individus, groupes, communautés et ethnies », admettant « la rationalité des différentes cultes, croyances et conceptions du monde ». L’universel devient   une caractéristique par excellence de l’humanisme , considérant le droit à la différence comme une source d’enrichissement.

Il s’agit d’  un humanisme qui accorde un statut particulier à l’homme, certes, mais pour insister sur ses devoirs envers les autres vivants et non sur ses droits sur eux .

Cette évolution fait de Marguerite Yourcenar une figure majeure de l’humanisme moderne, capable de conjuguer l’héritage antique avec les préoccupations contemporaines, notamment écologiques et éthiques. 

Puis suivront dans les années 1970, des récits autobiographiques Le Labyrinthe du monde I et II (1974-1977).

Le 6 mars 1980, Marguerite Yourcenar devient la première femme élue à l’Académie française.

Dans les années 1980, elle traduit des ouvrages de James Baldwin et Yukio Mishima. Elle continue d’écrire jusqu’à sa mort, publiant Le Temps, ce grand sculpteur (1983), Les Charités d’Alcippe (1984) et Le Cheval noir à tête blanche(1985). Peu avant sa mort, elle livre la première partie du récit Le Labyrinthe du monde III : Quoi ? L’Éternité qui paraîtra en 1988.

Marguerite Yourcenar meurt le 17 décembre 1987 à Bar Harbor, dans l’État du Maine, aux États-Unis. Elle est inhumée à Mount Desert Island aux côtés de Grace Frick.

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